Mickaël Mazaleyrat - Planète
Chic planète
L'harmonica n'est pas mon instrument préféré. Probablement ai-je été un peu saoulé par tous ces folkeux qui, peut-être sous l'influence de Bob Dylan, ont cru malin d'agrémenter leurs chansonnettes guitare-voix d'un solo criard à l'harmonica, alors qu'ils savaient à peine souffler dedans.
Mais là on a affaire au Spécialiste avec un grand S : il est tout simplement époust-soufflant !
Ayant remarqué son solo de dingue sur l'album de Slim Paul, j'ai suivi la piste. Bien m'en a pris. Car ce disque est un OVNI. Original, particulier, tantôt blues, tantôt folk ou trad, et parfois ça mélange tout... Ça va être compliqué à classer. Tant mieux !
Le côté iconoclaste et la voix me font penser un peu à Marka (le papa d'Angèle et de Roméo Elvis, qui voulait nous voir "Accouplés"). Ou à Kent. Ou à DJ Zebra. Des gens comme ça... À part.
L'album commence presque comme le boléro de Ravel ("Jungle five"). Du reste, des boléros, on y a droit un peu plus tard ("Bolerabe").
L'alternance est stricte entre les morceaux instrumentaux (tous les numéros impairs) et les morceaux chantés (tous les numéros pairs).
Sur ceux-là, les paroles peuvent tour à tour sembler naïves ("Planète") ou ésotériques ("Où êtes-vous ?") Elles sont en français, en allemand bizarrement prononcé ("Wolfsfrau"), en 4 langues ("Sigue tu camino", écrite et chantée par Nansa Mazaleyrat, tiens tiens) et en italien ("Amore mio").
L'univers posé dans cette Planète, si j'ose dire, sait se montrer riche en images. Ici un banquet médiéval ("Où êtes-vous ?"), là des oiseaux exotiques et des Indiens à la flûte de pan ("Amazonia burns") (flûte peule en réalité), ailleurs une promenade sur le Mississippi ("Smoky water"), autre part encore un désert aride, un canyon, un serpent qui se faufile entre les pierres en plein cagnard. La moindre goutte d'eau, même tiède, est précieuse. Inutile de préciser qu'à cet instant on ne va pas avancer vite ("Violon zing"). À cet instant-là seulement.
L'ambassadeur de la célèbre marque Hohner y met du cœur, des tripes, de la cervelle et des pieds car c'est souvent très dansant. Tous les abats en somme !
Certes l'harmonica domine, ou plutôt les harmonicas, car Mickaël en possède autant que de tonalités, et pour chacune un en mode majeur et un en mineur, qu'il accorde lui-même. Pour autant, cet ancien chef cuisinier assaisonne intelligemment son projet solo de claviers, de guimbardes – un instrument généralement trop peu employé, qui donne un dynamisme dément en faisant rebondir les sons, et qu'il utilise en lieu et place de la basse (des guimbasses donc !) – et de diverses percussions telles que le washboard par exemple.
Finalement, je trouve ça classe l'harmonica quand ça s'emballe comme ça, quand une sorte de folie (communicative) semble s'emparer du souffleur... Même si ce n'est pas devenu mon instrument préféré !
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Presque une heure de musique, ça permet d'en voir de toutes les couleurs, comme le staccato de "Kashmir" de Led Zeppelin dans "Bolerabe", le boléro arabe (ou oriental, tout au moins).
Les morceaux s'échelonnent entre 3 minutes et 6 minutes et demie ("Violon zing"), et l'absence de texte ne coïncide pas nécessairement avec une piste plus courte... sans que la longueur ne se fasse sentir ! Le tour de passe-passe, réussi, de Mickaël, consiste à y mettre suffisamment de créativité pour éviter le piège de la répétition – tout en conservant quand même un thème entêtant ("Paradise H").
Beaucoup trop de morceaux (62%) finissent malheureusement en 'fade' : il faudra faire preuve d'un petit peu plus d'imagination lorsqu'ils seront joués en concert. On peut lui faire confiance. -
Violon zing
Où êtes-vous ?
Sigue tu camino -
Amore mio
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La phrase
« Quel est ce butin fragile, qui s'endort et se perd à jamais » ("Où êtes-vous ?")
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luimickaelmazaleyrat.fr (188 Clics)
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…Et maintenant, écoutez !
- mickaelmazaleyrat.bandcamp.com/album/plan-te (148 Clics)
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Créé le2 juin 2021
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