Hania Rani - Ghosts
Faites des ghosts !
L'art du photographe est de capter la lumière. L'art de Hania Rani aussi.
D'entrée ("Oltre terra"), on devine un orchestre qui s'accorde avant un concerto qui s'annonce somptueux. Polonaise polie, elle prend ensuite soin de nous saluer : "Hello hello hello hello"... Ça ne vous rappelle pas quelque chose ? Nirvana, pas vrai ? Rien à voir, pourtant, puisque le son tourbillonnant en arrière-plan évoquerait plutôt "On the run" dans The dark side of the moon !
Ceux qui connaissent déjà cette pianiste virtuose ne seront pas surpris par cet album, qui ne diffère pas tellement de ses productions précédentes. Sauf que notre "Agnes Obel 2.0" met le curseur plus loin : plus planant, plus électro, plus chanté, plus jazz-soul (coucou Norah Jones), plus expérimental, plus varié et plus homogène (oui, les 2 à la fois) et plus de synthé (ça va, Jean-Michel Jarre ?)
Est-ce si étonnant de retrouver ici Patrick Watson, le Québécois volant ("Dancing with ghosts") ? Non, pas vraiment, tant ces deux-là semblent unis dans la suspension, très au-dessus du lot, avec un traitement des voix qui doit beaucoup à Thom Yorke.
Post-classique, cette originaire de Gdansk, qui a fait ses études à l'université de musique Frédéric-Chopin, nous fait sa spéciale : un staccato rapide et répétitif sur les touches de piano, à partir duquel elle laisse libre cours à des variantes et improvisations, dans l'esprit d'un autre pianiste polonais, auquel elle rend hommage ("Komeda").
Alors que "Utrata" figure la conclusion du concerto, et "Nostalgia" son appendice instrumental, "The boat" pourrait en constituer le préambule, la musique d'attente pendant que le public entre dans la salle et s'installe.
Pianiste depuis l'âge de 6 ans, elle a bien grandi, sa réputation aussi, et c'est désormais sur toute la planète qu'elle donne ses concerts cernée de 3 ou 4 claviers.
Dans ses paroles, rares (la moitié des morceaux), et répétées, cette admiratrice de Giacometti aborde de façon douce et abstraite le vieillissement et la ligne ténue entre la vie et la mort. Cette ligne où passe la lumière. Comme une photographie musicale.
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Les premiers titres sont magnifiques ; après ça se dilue un peu. C'est qu'on a affaire à un album long. 13 morceaux, 66 minutes. Hormis les pistes d'intro et de conclusion, rien en-dessous de 4 minutes. Avec un max de 11 minutes ("Komeda").
Prenez un morceau comme le single "Don't break my heart" – un air qui ne vous lâchera plus une fois qu'il vous aura attrapés. Là où d'autres auraient achevé ça au bout de 3 minutes, lorsque la chanson a tout dit, Hania prend encore plus de 2 minutes pour nous faire redescendre en douceur. Atterrissage maîtrisé. Ce qui nous permet d'accueillir la piste suivante et de repartir avec une envie renouvelée – plutôt que de conserver la tête dans les nuages. Et l'on pourrait faire la même observation sur plusieurs autres morceaux du disque.
Après, vaut-il mieux un album court qui nous laisse sur notre faim et dont on aura vite fait le tour, ou un album long bien complet sur le sujet/concept/style/artiste mais avec peut-être deux-trois morceaux superflus qui risquent de lasser ? La question reste ouverte, et je me garderais bien d'y répondre, sinon par un : ça dépend des cas (!) -
Don't break my heart
Dancing with ghosts
Utrata -
Thin line
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La phrase
« Don't you see how it's good? » ("Don't break my heart")
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elle
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…Et maintenant, écoutez !
- haniarani.bandcamp.com/album/ghosts (159 Clics)
- www.deezer.com/fr/album/449702355 (215 Clics)
- open.spotify.com/intl-fr/album/2nxnCjbaiAEJ4yBDMnQhJ8 (88 Clics)
- www.youtube.com/watch?v=o5MdcURuXao (94 Clics)
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Tagsclassique | lumière | Giacometti | Jean-Michel Jarre | Norah Jones | Agnes Obel | Komeda | Pink Floyd | Thom Yorke | Patrick Watson | instrumental | synthé | piano
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Créé le16 décembre 2023
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